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Le geste et la parole d'André Leroi-Gourhan

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Voilà une note dont j’aurai longtemps repoussé l’écriture.

Ce n’est pourtant pas que je doute de la pertinence d’inclure Le geste et la parole  de Leroi-Gourhan, livre d’anthropologie étudiant le passé et l’avenir du système ostéo-musculaire de l’homosapiens dans la bibliographie consacrée aux sports de combat.

Le texte de La tribu des lutteurs - spectacle consacré à la lutte que nous avons présenté à l’automne 2016 à La Commune d’Aubervilliers - est amplement influencé par la lecture des ouvrages de Leroi-Gourhan et je ne fais pas mystère du tribut que je dois à ce chercheur.

S’il y a un homme qui a intensément regardé, observé, analysé le corps de l’homme, c’est certainement cet archéologue qui fouilla entre autres les grottes de Lascaux et d’Arcy-sur-Cure.

Une de ses principales théories exposée dans Le geste et la parole est que c’est la transformation mécanique de son squelette qui créa l’homme et son cerveau. Pour lui, c’est la marche à pieds, la station debout qui ont permis le développement du néocortex, et que si l’homme pense, c’est parce qu’il est un bipède.

Pour ceux qui, comme nous, s’élèvent contre le primat du langage, de l’écrit sur tout autre activité humaine, qui combattent le mépris des prétendus intellectuels pour toutes les activités du corps, et réfutent la division platonicienne et chrétienne entre l’âme et le corps, la lecture des œuvres d’André Leroi-Gourhan permet de nous confirmer dans notre idée que nous sommes des corps.

À son sens, la technologie humaine s’est, à proprement parler, exsudée du corps de l’homme : les racloirs, les couteaux, les flèches, les missiles sont une extériorisation croissante des ongles. La question donc se pose de manière aigüe à la fin de son livre : que restera-t-il de l’humanité lorsque la technologie se sera autonomisée par rapport à son corps au point que la question se posera de la caducité de celui-ci ? C’est l’urgence de cette question qui motive dans une large mesure l’attention que nous portons à ces lieux d’existence persistante et radicale des corps que sont les pratiques des sports de combat.

S’il y a un lieu où se manifeste avec obstination l’intelligence des corps et où se pratique une résistance têtue à son évaporation, c’est dans la lutte, la boxe et le MMA.

Avec autant de bonnes raisons pour inciter nos lecteurs à découvrir l’œuvre d’André Leroi-Gourhan, on se demande pourquoi la présente note n’a pas été écrite depuis belle lurette ?

C’est que, surinfectant en quelque sorte sa paresse, la question suivante taraudait l’auteur de cette note : quels extraits donner pour donner envie au lecteur d’aller plus loin dans la découverte des « Technique et langage» ou «  la mémoire et les rythmes» ? L’écriture de Leroi-Gourhan se prête mal au découpage, et son écriture très construite dans son raisonnement supporte assez mal l’action de la fonction couper/coller.

Il y a dans cette œuvre une incapacité à se prêter au jeu du « pitch », résumé alléchant en trois lignes promettant surprises, humour, divertissement et enseignement ludique, qui rappelle ces musées archéologiques, aux vitrines emplies de bifaces aux étiquettes aussi sobres que mystérieuses.

J’ai, malgré tout, choisi quelques extraits. Il y en a trop, ils sont trop longs, mais quand on aime, on ne compte pas les lignes !

Le Geste et la Parole, 1. : Technique et langage [archive], 2. :Mémoire et les Rythmes [archive], Paris, Albin Michel, coll. « Sciences_d'aujourd'hui », 1964-1965.

extraits du "geste et la parole"

Lutte

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