Rédigé par Sébastien le . Publié dans Interviews.

Interview de Hocine (lutteur)

Hocine est le fils de Djimil, lutteur. Il vient aux entrainements des Diables Rouges régulièrement. Il fait partie du groupe des minimes du club.

J’ai 12 ans.

La première fois que je suis allé dans un club de lutte, c’était à Créteil, j’étais en CP je crois, je ne me rappelle plus l’âge. C’est mon père qui m’a fait découvrir la lutte. Avant j’en avais déjà vu. Un jour mon père m’a emmené dans un club et jusqu’à maintenant j’ai jamais arrêté la lutte. Avant j’avais déjà été sur des tapis mais j’avais jamais fait vraiment de la lutte en club.

Mon premier club c’était Créteil, j’ai déjà été dans un club à Ivry aussi.

Ça m’a fait bizarre au début parce que je savais pas trop comment me débrouiller en lutte. Il y en a qui connaissaient, qui avaient l’expérience, moi j’étais en débutant.

Avant, j’avais déjà été voir sur internet comment c’était, j’en ai vu au Cirque d’Hiver aussi. C’était France-Russie je crois, je sais plus. En tout cas il y avait l’équipe de France. J’ai vu et j’ai bien aimé.

J’ai pas vu mon père combattre, j’étais pas encore né. J’ai vu des photos mais je l’ai jamais vu combattre.

C’est mon père qui m’a fait découvrir la lutte, il m’en avait déjà parlé, et on en parle toujours. Quand on est tous les deux, on en parle. On parle de la lutte, des compétitions et tout ça. On parle aussi des athlètes de lutte, après il me parle des techniques, il me raconte.

Mon père a été en équipe d’Algérie, pas en équipe de France ; il a déjà fait troisième au championnat d’Afrique, après il a fait troisième au championnat de France je crois, après il a lutté pour Bagnolet, aussi pour Ivry ; il a gagné des titres avec Bagnolet, parce que j’ai des médailles dans ma chambre, des coupes aussi. Il y a plein de médailles et de coupes. Il y a plein de compétitions qu’il a fait mais je les connais pas toutes.

Il y a des coupes et des médailles de mon père dans ma chambre, mais que certaines, parce que j’ai pas la place de tout mettre. Sinon je mettrais tout.

J’en ai gagné aussi, quelques unes. J’ai gagné quatre ou cinq coupes après les médailles, j’ai dû en gagner quatorze ou quinze.

A l’entrainement, j’aime bien à peu près tout. J’aime bien apprendre des nouvelles techniques, répéter celles que j’aime bien, et les petits matches à la fin, ça défoule un peu.

J’ai des techniques préférées. Je dois en avoir deux-trois. Il y a l’attaque de jambes normale, soulevé. Mais maintenant je vais plus trop soulever, mon père il m’a dit, parce que ça me fatigue, du coup après je prends les deux jambes et je mets le crochet, c’est plus facile. J’ai le bras à la volée que j’aime bien mais que je tente pas trop en libre parce que on peut me contrer. Et j’ai aussi l’attaque de jambes  à une jambe et le crochet.

Et après encore j’ai de la gréco. Mais l’année prochaine. J’en ai jamais fait. En compétition. L’année prochaine parce que là je suis trop jeune.

Je suis surclassé en libre mais on a pas le droit en gréco. Parce que c’est trop dangereux, du coup je l’ai fait que en libre. Surclassé.

C’est trop dangereux parce que on sait jamais, si par exemple un garçon plus physique que moi, il part. Alors que en libre, tout le monde en fait, dès que tu commences la lutte, c’est de la libre que tu fais.

Surclassé c’est quand tu luttes avec des plus grands que toi mais toujours le même poids. J’ai voulu parce que ça me fait apprendre. Je lutte pas pour gagner impérativement, c’est aussi pour apprendre, avec les plus grands. Comme ça, ça me prépare un peu pour l’année prochaine. Et puis après j’ai voulu découvrir comment c’était. Comme ça, ça me prépare pour l’année prochaine, je sais comment ça va être, le championnat de France.

C’est ma deuxième année en benjamin, l’année prochaine je passe en minime.

Mon premier combat, j’étais petit, c’était les départementaux du Val de Marne, c’était contre quelqu’un de mon club. J’ai gagné. Je me rappelle plus de son prénom, je me rappelle plus les points que j’ai marqué mais par contre c’était un ami à moi, on s’aimait bien, on était en club ensemble.

Mon premier combat contre quelqu’un que je connaissais pas, c’était la même compétition, j’ai gagné aussi. C’était contre quelqu’un de Alfortville ou Villejuif, je m’en rappelle plus. J’ai eu du mal à lutter, je m’en rappelle, contre lui. Il savait bien lutter et puis moi c’était ma première compétition. Moi j’ai commencé tard un peu. Si je voulais je pouvais commencer dès le début, mais j’ai pas commencé dès le début, j’ai commencé poussin C. Et donc du coup, il savait bien lutter en face. Mais j’ai quand même gagné. J’ai gagné par tombé.

Ma première défaite, je m’en rappelle. J’ai perdu 8-0.  La première fois que j’ai perdu c’était la compétition de Bagnolet je m’en rappelle. J’ai perdu 6-5. En fait je menais 5-3 et il restait vingt secondes à peu près. Il était énervé parce que je lui avais fait mal, et du coup moi j’étais plus trop concentré, du coup il m’a mis trois points. Et j’ai perdu. C’était contre un Hongrois. C’est ça ma première défaite. Oui, j’étais déçu. Les trois points, c’est parce qu’il m’a fait une attaque aux jambes, j’ai pas su défendre et il m’a mis sur le dos.

J’ai plus de victoires que de défaites. Je préfère les victoires que les défaites. C’est toujours bien d’avoir des victoires mais aussi des fois c’est bien de perdre, parce que ça t’apprend un peu.

Je me suis déjà blessé. Pas que dans la lutte, mais je me suis déjà blessé. Pas des grosses blessures. J’ai jamais eu des blessures au-dessus de deux mois. J’ai pas eu de grosses blessures. En compétition, j’ai toujours un petit truc, une petite douleur au doigt, mais là où je me suis le plus blessé, c’est à l’entrainement. A l’épaule. En compétition, je me suis jamais gravement blessé. Ah si ! c’était aux Iles de France cette année. En fait en-dessous du genou j’ai un Osgood, c’est quand on est grand, enfin quand on grandit, on a ça. Une boule en-dessous du genou. Du coup, j’ai voulu faire un crochet et mon genou il a tapé. Du coup après je devais faire la finale mais j’ai déclaré forfait parce que je pouvais pas lutter. Du coup, j’ai dû arrêter un mois et le médecin il m’a dit : « Si t’as encore mal, faudra t’arrêter un an à peu près. » Mais ça va. Là j’ai plus mal parce que je porte une genouillère maintenant. Avant j’en avais pas. Du coup, voilà. Ça me fait plus mal maintenant. Quand je m’entraîne j’ai une genouillère, du coup quand je reçois des coups qui touchent mon genou, ça va. C’est le choc qui peut faire mal. Mais non, sinon ça me fait plus mal.

Pour les benjamins et même pour les poussins, j’ai jamais fait de régime pour le poids. Mais cette année pour les surclassés, je fais plus attention ; je fais pas un régime : courir, perdre du poids. C’est : j’arrête les bonbons, les gâteaux. Et du coup ça me fait perdre du poids. Je lutte en benjamin 44 kg et en minime 42 kg. Toujours je suis à 100 grammes moins. Du coup je m’y prends à l’avance pour les championnats de France, c’est dans un mois, j’ai le temps. Là je m’y suis pris au début du mois. C’est un peu dur mais faut bien le faire.

Je suis pas bagarreur. Je me suis jamais bagarré. Je cherche pas, et du coup je me bagarre pas.

Je suis fils unique.

Avec mon père, juste des fois pour rigoler je lui fais des prises de lutte mais je le fais pas tomber.

Je me bagarre pas.

Mon rêve en lutte c’est d’être en équipe de France, et de faire champion olympique et tout. D’être fort, super fort.

Mon grand-père il faisait pas de lutte. Mon père m’a pas raconté pourquoi il avait fait de la lutte. Je sais pas.

Je sais que ça demande des efforts de devenir champion. Faire des efforts, ne pas être faignant. Oui je sais ce que ça demande. Ça demande plein de choses. Faire attention à son poids aussi. Plein de choses.

Au début Créteil c’était pour commencer. J’avais juste à traverser une rue. Je suis à côté du club en fait. J’habite juste à côté. Je suis venu à Bagnolet parce que je voulais commencer à être vraiment fort et comme Vadim c’est un bon entraineur, je suis venu ici. Et aussi parce que la mère d'un copain elle m’emmène, sinon je serai pas venu ici parce que mon père il travaille le soir, il peut pas tout le temps m’emmener. Du coup après on a vu avec la mère d'un copain et un père. Du coup ils m’emmènent des fois. Parce qu’on habite à côté.

J’ai pas d’entraineur fétiche, du moment qu’il entraine bien. Vadim c’est bien, comme entraineur c’est bien. Après on verra plus tard s’il y a d’autres entraineurs plus fort mais Vadim pour l’instant c’est bien.

Des fois je vais voir des compétitions quand c’est à côté. Par exemple, j’étais au tournoi de Paris, je sais plus si c’était au mois de janvier ou au mois de février, j’ai été le voir. Comme c’était à l’INSEP, c’était à côté, du coup j’y ai été une journée parce que il y avait une journée où j’étais en compétition. Mais sinon, oui, j’aime bien aller regarder des matches. J’aime bien aussi regarder les Iraniens lutter. Les Iraniens, parce que mon père il me dit tout le temps : « Regarde leur lutte, elle est bien leur lutte, il faut faire comme eux. » Parce que eux, ils ont une bonne lutte, ils sont tout le temps premier, ils sont super forts.

Comme objet symbole de la lutte, il y a peut-être les petites statues. Tous les lutteurs en ont. 0ù je vais, par exemple, chez Jean-Jean et tout, il y a toujours une petite statue avec un lutteur qui fait une prise. Ça, ça me rappelle la lutte. Moi j’ai que des coupes et des médailles.

J’ai fait de la piscine, du foot, et là je fais du hand.

J’ai jamais fait d’autres sports de combat. Pour moi, je fais de la lutte, ça me suffit. Et puis j’aime bien la lutte.

La lutte c’est individuel, le hand faut être collectif. C’est pas le même sport. Il y a du contact aussi au hand mais à la lutte faut être individuel et au hand faut être collectif.

On montre une image des fresques représentant des scènes de lutte, trouvées dans une tombe égyptienne à Beni-Hassan (1.800 av J.C.)

Ça me raconte l’histoire. Je reconnais quelques prises. Il y en a qu’on utilise toujours au jour d’aujourd’hui : tour de hanche ; prend la jambe et crocheter. Il y en a que je connais pas.

J’ai pas trop de bouquins de lutte ; les prises, je les apprends à l’entrainement Ou en regardant des vidéos de lutte. Sur youtube quand je regarde des lutteurs et que je vois qu’ils font des prises, après j’essaie de les faire à l’entrainement.

Ce qu’on voit sur le dessin, comme c’est à l’ancienne, je pense que c’est des débuts de prise. Après il y en a qu’on utilise plus. Il y en a qu’on utilise toujours.

Je connais vaguement l’histoire de la lutte. C’était à l’époque des Romains je crois, c’était un sport olympique, c’était le premier sport de combat. Je connais pas trop trop l’histoire.

Sur internet je regarde que de la lutte comme on fait. Quand je regarde, c’est pour apprendre des prises, la garde, plein de choses. Après j’aime bien regarder des vidéos de lutte aussi, ça passe le temps. Des combats, championnat du Monde et tout.

Ce que je trouve beau en lutte ? Les prises, enfin tout. A peu près toute la lutte.

Oui c’est fatigant la lutte, faut se reposer après. Après moi j’aime bien ça du coup je viens tout le temps mais c’est fatigant.

Le plaisir c’est tout le temps. J’en ai jamais marre.

Lutte