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Frédéric Roux: Alias Ali collection Folio, 2013

 Alias AliOn se demande si le livre est un roman, une série d’interviews enregistrées partout dans le monde, ou une compilation de témoignages sur la vie de Mohammed Ali.

C’est un puzzle, une histoire vraie, un mythe. Et comme souvent dans les mythes, on mélange la haute littérature avec la langue de la rue, la grande histoire et les détails les plus triviaux. On ferme le livre en disant : ah oui, ça a du se passer comme ça la mort d’Oum-Baba, il était ainsi Gilgamesh. Et ici : ce Ali était un grand blablateur, un type qui masquait sa peur derrière ses provocations, un héros métis du black-power, mais c’est celui qui a résumé en une phrase ce que pensaient tous les noirs américains de sa génération : pourquoi irai-je me battre au Vietnam ? Les vietminh ne m’ont rien fait à moi. Et qui surtout a mis sa parole en acte, en refusant de se lever à l’appel de son nom au centre de recrutement. C’est aussi celui qui a battu Sonny Liston, Georges Foreman, et Joe Frazier dans des combats à proprement titanesques. Le livre est aussi une invitation à voir et revoir ses plus grands matches.

Faire une notice sur Mohammed Ali, ce serait finalement écrire sur toute la boxe, tant ce champion résume en lui l’apogée et la quintessence du noble art.

Il dansait comme le papillon et piquait comme l’abeille disait-il de lui-même.

Le livre, ou plutôt le cut-off de Frédéric Roux charrie force évènements et le lecteur se laissera porter par le cours puissant de ce livre fleuve. Il croisera des personnages pittoresques : Ferdie Pacheco (son soigneur), Angelo Dundee (son entraineur), Bundini Brown (son âme damné), Joe Frazier (son frère ennemi), Elijah Muhammad (son gourou). Et il verra le panorama de l’histoire américaine se déployer, dans un mouvement fort qui soulève alors le pays : le black power.

J’ai trouvé passionnant le portrait de Malcom X, ses relations avec Cassius Clay qui grâce à lui devient Mohammed Ali. Aussi la nature hallucinante de Nation of Islam, la secte qui va gérer la vie et la fortune d’Ali : mélange américain de gangstérisme, d’affairisme, et d’élucubration religieuse (le retour du Prophète aura lieu - d’après Nation of Islam - dans une soucoupe volante attendant dans un vaisseau spatial caché derrière la lune ( !)).

On ferme le livre en ayant une immense sympathie, ou plutôt en comprenant mieux l’immense sympathie que suscitait – que suscite toujours - ce boxeur noir de Louisville (Kentucky). On aime Ali, comme on aime ceux qu’on aime vraiment, avec toutes leurs qualités, leurs défauts donc aussi, et avec toute la palette des sentiments qu’on a pour les gens qu’on sait qu’on ne quittera jamais vraiment.  

En contrepoint, on peut écouter la grande traversée consacrée par France Culture l'été 2018 à Ali.

Boxe, Bibliographie, violence sociale, politique, black power

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