Rédigé par Stéphane le . Publié dans Fil rouge.

Jeter l’éponge

Au gymnase Pouchet où nous étions pour les « Championnats d’Ile de France de boxe amateur », gymnase pas chauffé (comme souvent les gymnases), mais qui offre une bonne visibilité depuis les tribunes (on n’a plus le droit -plan vigie-pirate-renforcé oblige- s’approcher du ring protégé par des barrières Vauban) au gymnase Pouchet donc, ni dans aucune autre compétition, je n’ai vu aucun boxeur jeter l’éponge de lui-même.

D’ailleurs, quand un coach annonce l’abandon de son boxeur, c’est une serviette qu’il lance en fait d’éponge.

Dimanche, un jeune maghrébin (il a levé les deux mains en signe de prière avant son combat) affrontait un jeune portugais (il s’est signé et avait des cheveux drus et peignés en arrière avec de la gomina).

Le portugais – un bon combattant à ce qui se disait dans les travées – semblait avoir fait trop la fête la veille. Il n’était pas à son affaire. Il semblait absent, tous ses mouvements étaient lents, ses coups ne partaient pas, il hésitait, avançait, reculait sans trop de conviction. Il semblait attendre la fin du premier round pour que son entraineur ne le réveille avec de grandes gifles, comme on le voit faire parfois.

Il allait donc vers une défaite bonhomme face à un adversaire plus petit, mais résolu, rapide, tranchant qui lui administrait une dégelée de coups (encore un drôle d’expression!). Et voilà-t-y pas qu’un coup nonchalant du Portugais ouvre l’arcade sourcilière de son adversaire à quelques secondes de la fin du combat. L’arbitre convoque le médecin. C’est une femme en blouse blanche, elle examine l’arcade en reculant sa tête. Dit un mot à l’arbitre, le boxeur lui parle, il la supplie, non, elle confirme à l’arbitre, qui interrompt le combat et donne la victoire au portugais qui n’en revient pas de sa bonne fortune. Le boxeur éliminé supplie l’arbitre de le laisser finir son combat, il éclate en sanglot, l’arbitre secoue la tête, et lève la main du portugais, qui, lucide et bon camarade, désigne aux spectateurs son adversaire comme le vrai vainqueur. Les deux repartiront d’ailleurs, le vainqueur n’en finissant pas de tenter de consoler l’intarissable flot de larmes s’échappant de son adversaire vaincu .

-       Ce n’est pas un jet d’éponge ça. C’est une victoire par abandon sur décision de l’arbitre.

-       Je le concède, je me suis égaré. Mais maintenant que j’ai rédigé ce récit, je le garde : ce serait dommage de gâcher, et puis dans un blog, c’est souvent du tout venant alors je ne vois pas pourquoi je me priverais.

Le jet de l’éponge – de la serviette blanche, donc – ce fut deux combats plus tard.

Le grand escogriffe était dominé sans contestation possible depuis deux rounds. Nous voilà au milieu du troisième et il reçoit d’abord un direct qui le fait reculer du centre du ring jusque dans les cordes, il titube, l’arbitre le compte. Le combat reprend là, et le grand type fait à peine un pas, qu’il reçoit deux crochets qui le jettent au sol. Son coach jette la serviette, et l’arbitre donne la victoire à l’autre.

Il est furieux le grand vaincu. Les yeux lui sortent de la tête. Il jette ses gants au visage de son coach. Il donne des coups de pieds aux pylônes du ring. Il hurle qu’on lui vole son combat. Pourtant, il est bien le seul à protester. Son coach, l’arbitre, les juges, les spectateurs, tout le monde voyait bien qu’il était en train de se transformer punching-ball humain, et personne n’avait envie de voir se prolonger ce combat. Mais, lui qui recevait pourtant les vrais coups, semblait y avoir été moins sensibles que nous protégés, paisibles, à l’extérieur du ring.

« C’est toujours comme ça » me dit Sébastien « ils protestent tous quand leur coach jette l’éponge. Eux, malgré tous les coups qu’ils reçoivent sont dans leur combat ; ils sont persuadés que, sur un contre miraculeux, il parviendront à renverser la situation. »

Des fois, ça dure trop longtemps pourtant. Dans les tribunes, on a envie que ça s’arrête. Que l’arbitre, les juges, les entraineurs, et nous aussi les spectateurs sommes les complices, voire les organisateurs d’un massacre. Organisateur, oui, car sans notre présence à nous spectateurs, le combat n’aurait pas lieu.

A***, boxeuse, un jour que je lui disais que la boxe féminine me semblait plus technique que la boxe masculine m’a envoyé ce lien vers ce combat entre Anne-Sophie Mathis et Holly Holm.

http://www.dailymotion.com/video/xmt4a6_anne-sophie-mathis-vs-holm-holly_sport

Là, c’est sûr que c’est moche, et on se demande pourquoi l’arbitre n’interrompt pas la correction que reçoit Holly Holm.

C’est la même Holly Holm qui a récemment infligé sa première défaite à Ronda Roussey en MMA. Et là, même si cette victoire faisait mal à voir pour les admirateurs de Ronda Roussey, KO au 2° round, elle était tout à fait correcte (comme disent les américains). http://bestinmma.blogspot.fr/2015/11/ronda-rousey-vs-holly-holm-ufc-193.html

Pour ce qui est de Ronda Roussey, j’attends avec impatience l’article que Sébastien, qui est un inconditionnel, nous a promis la concernant pour notre site !

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